Canopée

Ren: 8,5/10

Faible que je suis, j’ai encore craqué. Bon j’ai beaucoup d’excuses à faire valoir: les confinements successifs, le boulot, le famille, l’alcool, les substances hallucinogènes, mon ongle incarné… bref le train-train habituel de tout un chacun et de toute une chacune. J’ai craqué disais-je, et j’ai participativement financé ce Canopée/Canopy (version Deluxe, avec les meeples couleur miel doré kawaiii de la mort). J’ai fait ça il y a… plus que ça, et du coup avec les confinements, les bateaux bloqués, les chaînes logistiques toutes bouleversées, il vient enfin d’arriver dans ma chaumière il y a quelques semaines.

Et l’attente en valait-elle la peine? Et bien ma foi oui. Dans Canopée on va tenter de créer la forêt la plus luxuriante et la plus équilibrée (représentée par des cartes avec des plantes, des arbres, des animaux, du soleil, de la pluie, des catastrophes naturelles..) Le jeu est un mélange de stop ou encore, de cartes avec effets, d’interaction indirecte et directe, de salade de points et de « tactique matinée de stratégies intermédiaires » (si si je vous jure).

Le jeu est divisé en 3 saisons. A chaque saison on va épuiser un paquet de cartes (représentant +/- un tiers du total des cartes) via un astucieux système de choix parmi 3 piles face cachée. Au départ les 3 piles ont respectivement 1, 2 et 3 cartes face cachée. A son tour une joueuse doit prendre la première pile (une carte donc) et la regarder. Si elle lui convient elle le place dans son forêt (les plantes de la même espèce ensemble, les animaux itou, les arbres pour faire grandir un arbre existant ou en créer un nouveau, une canopée pour « clôturer » un arbre…). Si non elle la replace, face cachée, et ajoute (sans la regarder) une carte du paquet de la saison en cours. Ensuite elle regarde la deuxième pile (ayant 2 cartes donc) et réalise le même processus. Puis éventuellement la même chose avec la 3ème pile (qui elle a 3 cartes). Si elle n’est toujours pas satisfaite avec la 3ème pile, après l’avoir reposée et ajouté une carte, elle est obligée de prendre la première carte du paquet, et de la poser dans son jeu. On va jouer chacune à son tour jusqu’à ce que le paquet de la saison en cours soit épuisé.

A la fin de chaque saison il y a un décompte de points (après avoir appliqué les éventuelles catastrophes naturelles, i.e. sécheresse, incendie…), pour les combinaisons de plantes, pour les combinaisons de pluie et de soleil, et pour les arbres terminés. Et à la fin de la partie il y a un décompte final supplémentaire pour la plus grande forêt, et pour les animaux.

Tout ça donne un jeu familial tout à fait agréable, qui recèle même 2 ou 3 éléments qui le font sortir du lot. Le premier est la revisite de la mécanique de stop ou encore. Les piles asymétriques et le fait d’ajouter à chaque fois une carte face cachée (donc d’un côté vous connaissez les piles que vous avez passé, mais de l’autre il y a une nouvelle carte inconnue, qui peut modifier complètement la valeur de la pile par rapport à votre jeu) font que vous ne maîtrisez pas tout (donc stop ou encore) mais que vous avez quand même une partie de l’information (ce n’est pas du « pur hasard », comme dans Can’t stop par exemple). Donc une revisite assez intéressante. Le deuxième est donné par les cartes animaux. Il y a toujours 2 animaux par espèce, un couple qui va essayer de s’unir (en langage de jeu: vous marquez plus de points à la fin de la partie si vous avez le couple dans votre jeu). Et l’un des deux a un pouvoir particulier, que vous allez pouvoir utiliser pendant la partie, à votre tour ou à la fin d’une saison (regarder une pile, prendre une pile qu’on a passé, ajouter des cartes…). Les effets des animaux du jeu de base sont déjà sympas et donnent du piment, et les effets des animaux de la version avancée (incluse d’office dans le jeu) le sont encore plus et donnent de la variété et de la surprise. Le troisième est évidemment apporté par les illustrations somptueuses du magicien Vincent Dutrait. Si j’étais Anglois je dirais, avec l’accent d’Oxbridge et une patate chaude dans la bouche qu’elles sont « georgous ». Bref du très grand art qui aide à s’immerger dans le thème. Et enfin, last but not least, la durée est parfait pour ce genre de jeux. Plus long ce serait lassant. Plus court ce serait trop aléatoire, sans impression de contrôle. Ici on a le bon compromis.

Au final un jeu très agréable, un familial plus qui ne fera pas tâche à la table de joueuses plus aguerries!

PS à noter que le jeu est au départ prévu pour 2 joueuses, même si les règles sont prévues de 1 à 4, et qu’il tourne aussi dans ces configurations

SwatSh: 8 /10

La mécanique de base de Canopée est proche de celle crée 14 plus tôt par Michael Schacht avec Zooloretto. Au début de la partie on place 3 rangées de cartes. Une comprenant 1 carte, une seconde en comprenant 2 et une dernière 3. A son tour, on doit prendre une des rangées. On regarde la première et si on ne la prend pas, on y ajoute une carte face cachée et on regarde la seconde rangée, si on la prend, on prend toutes ses cartes et on ajoute une carte à la rangée qui n’en comprendra plus qu’une alors (si vous suivez 😉 ). Si on ne prend pas la seconde rangée, on y rajoute une carte et on regarde la troisième. On peut même passer la troisième rangée pour prendre alors la première carte du paquet. C’est donc une sorte de stop ou encore, où, à chaque fois qu’on décide de ne pas prendre la rangée, on prend le risque que la suivante soit pire 🙂 Evidemment, contrairement à Zooloretto, dans Canopée, les cartes sont placées face cachée. On navigue donc un peu à l’aveugle mais c’est comique à faire 🙂

Une fois une des rangées prises, vous devez placer immédiatement toutes les cartes qu’elle contenait devant vous. Il y a pas mal de cartes aux effets différents et c’est ça qui est chouette avec Canopée. Vous avez bien sûr des effets collection mais qui sont originaux et qui vont, par exemple, scorer que si vous en avez un nombre impair ou que si vous en avez 2 maximum. Il y a des cartes qui vous permettent d’en piocher 3 pour en choisir une, des cartes tronc et des cartes feuilles qui se placent au dessus des troncs, des cartes météo qui scorent par pair et des animaux qui vont apporter de petites capacités asymétriques comme de pouvoir piocher une carte supplémentaire dans certains cas ou de se défausser d’une carte par manche.

Où est le stop ou encore alors me direz-vous? Vous avez aussi des cartes cataclysme qui vont apporter le feu, la maladie ou la sécheresse en vous obligeant à défausser des cartes. Il faudra fuir ces cartes à tout prix.

Ajoutez à ça un peu d’interaction dans la course à l’arbre le plus haut ou à la plus grande forêt et vous obtenez un jeu familial rafraichissant, très sympa à jouer et aux superbes illustrations de Vincent Dutrait qui permettent de bien s’imprégner dans le thème. J’ai été néanmoins un peu chagriné par l’absence de choix stratégiques. On ne se dit jamais par exemple « cette manche-ci, je vais tenter tel type de plante ou tel type d’animaux ». Non, c’est impossible de prévoir à l’avance, on prend ce qui vient en espérant que ça nous convient 😉 Le fun provient plus dans la prise de risque, les effets multiples des différentes cartes, le jeu de majorité et les belles illustrations.